Résumé
La famille Grégoire se compose de Monsieur et Madame Grégoire et de leur fille, Cécile. Leur fortune, qui s’élève annuellement à quarante mille francs, est entièrement investie dans une partie des mines de Montsou. L'origine de cette fortune remonte à la création même de la Compagnie des Mines. Les Grégoire mènent une existence bien réglée ; une part des quarante mille francs annuels est dépensée et les économies restantes sont consacrées à Cécile. Ses parents satisfont tous ses caprices et la comblent d'affection et de chaleur.
Ils dînent et sont rejoints par Monsieur Deneulin, un cousin de Monsieur Grégoire. Deneulin a hérité d'un denier dans les mines de Montsou et s'est empressé de le vendre lorsque celui-ci a atteint un million. Néanmoins, Deneulin n'est pas doué pour la gestion de l'argent et demande un prêt à Monsieur Grégoire. En voyant le visage troublé des Grégoire face à cette demande, il sauve les apparences en disant qu'il plaisante. Madame Grégoire révèle également que Négrel, le neveu de M. Hennebeau (le directeur du Voreux), va se marier avec Cécile.
Zola décrit les événements qui se produisent le même jour en se concentrant sur Maheude (la mère). Les Maheu se réveillent, prennent leur maigre petit-déjeuner et partent au travail. Maheude se rend avec Lénore et Henri chez Maigrat, qui possède une boutique où l'on trouve de tout : épicerie, porc, fruits, bière et casseroles. Maigrat était autrefois un surveillant au Voreux. Il a fini par créer une entreprise qui a pris une ampleur telle qu'il a tué le commerce de détail de Montsou. Il a centralisé toutes les marchandises. L’importante coutume des corons lui a permis de vendre à meilleur marché et de faire plus longtemps crédit.
Maheude vient demander un crédit supplémentaire et explique que la grève qui a eu lieu précédemment l'a empêchée de rembourser son ancien crédit. Maigrat refuse. Il est bien connu que lorsqu'un mineur veut prolonger son crédit, il n'a qu'à envoyer sa fille ou sa femme, quelconque ou jolie, pourvu qu'elles soient complaisantes. Maheude sent le regard menaçant de Maigrat sur son corps et s’en va, en colère. Elle se rend chez les Grégoire. Ils demandent à leur fille et aux servantes de remettre un paquet à Maheude. Cécile l’ouvre et y met deux robes. Elle y ajoute des fichus, des bas et des moufles. Cécile offre une brioche à Henri et Lénore, que Maheude entraîne chez Maigrat sur le chemin du retour. Elle mendie avec tant d'insistance qu'elle finit par emporter du pain, du café, du beurre et même une pièce de cinq francs. Il s’enquiert de Catherine et fait comprendre à Maheude d'envoyer sa fille chercher elle-même les provisions.
Plus tard dans la journée, alors que Maheude fait des courses et bavarde avec d'autres femmes, Madame Hennebeau amène des visiteurs au village. Chaque fois que la Compagnie des Mines amène des visiteurs, ils ne manquent jamais d'aller directement chez Pierronne, dont le logement est propre. Pierronne a en effet une liaison avec le maître de la fosse (qui gagne beaucoup d'argent). M. Hennebeau les emmène ensuite chez les Maheu, ce qui terrifie Maheude. Heureusement, Alzire a mis de l'ordre. Les visiteurs, bien que mal à l'aise, complimentent Maheude et ses enfants. Les visiteurs partent et tout le coron sort pour les regarder. Trois heures sonnent. Les ouvriers se mettent en route et rentrent chez eux.
Après avoir déposé Étienne chez Rasseneur, Maheu rentre chez lui. Alors qu'ils dînent de bon cœur, chacun commence à se laver dans le demi-tonneau transformé en baignoire. Tous les enfants étant montés à l'étage, Maheu est le dernier à prendre un bain. Maheude le lave et lui raconte comment elle a obtenu toutes les provisions. Ils font l'amour. Après s'être séché, Maheu voit Catherine descendre dans sa robe du dimanche. Elle dit qu'elle est partie acheter un bonnet. Alors que Maheu s'occupe de son jardin dans l'après-midi, Pierronne vient lui demander si c'est avec Jeanlin que sa fille Lydie est partie. Levaque, présent dans le jardin de Maheu, répond qu'il doit en être ainsi, car Bébert a également disparu.
Chez Rasseneur, Étienne rentre dans la petite chambre sous les toits et fait face au Voreux. La fatigue le gagne lorsqu'il s'allonge sur son lit. Il se réveille au crépuscule, sort pour prendre l'air et se promène au hasard dans le village. Il voit Zacharie réclamer de l'argent à sa maîtresse Philomène pour aller le dépenser au Volcan. Philomène lui en donne en échange d'une promesse de mariage. Étienne voit aussi Jeanlin qui rabroue violemment Lydie et Bébert. Ils ont volé de l'argent, mais Jeanlin prend plus que sa juste part. Ils voient Étienne les observer et s'enfuient.
Étienne tombe alors sur le Requillart, où toutes les filles de Montsou rôdent avec leurs amants. C'est un lieu de rendez-vous commun, l'endroit isolé et désert où les hercheurs viennent faire l'amour. Un concierge du nom de Mouque vit également au Requillart avec sa famille. Lui et Mouquet (son fils) vivent dans une pièce et Mouquette (sa petite-fille) dans l'autre. Catherine et Chaval arrivent aussi au Requillart, mais Catherine hésite et résiste. Étienne ne peut pas voir leurs visages, mais se demande s'il doit intervenir. Il décide de ne pas le faire. Catherine se hâte de regagner le chemin du coron. Chaval continue à essayer de la charmer. Ils finissent par se rendre à la boutique de Maigrat pour acheter le bonnet de Catherine. Le fait de les voir ensemble rend Maigrat furieux. Étienne les suit et est tourmenté par le désir de voir leurs visages. Ils passent à côté de lui sans s'apercevoir de sa présence. Étienne retourne ensuite chez Rasseneur.
Analyse
Zola passe à la description de la vie de l'autre partie des protagonistes – les propriétaires, investisseurs et directeurs des mines. Tous acceptent ouvertement les conditions inhumaines dans lesquelles vivent les mineurs. Les Grégoire pensent que les mineurs sont chanceux et devraient apprécier la possibilité de travailler, sans se plaindre des difficultés qu'ils rencontrent. Leur inconscience témoigne de l'indifférence de la conscience bourgeoise à l'égard de la classe ouvrière mais aussi peut être d’un mécanisme de défense pour faire face à la culpabilité qu’ils ressentent face à la misère qu'ils causent. Zola semble souscrire à une lecture moins hostile des intentions bourgeoises, les considérant comme ignorantes des réalités.
Les contrastes frappants entre les conditions de vie du prolétariat et de la bourgeoisie indiquent que Zola s'écarte de son écriture naturaliste. L'attention du lecteur est attirée par la facilité avec laquelle les Grégoire ignorent les dures réalités de la vie des mineurs. Le parti pris de Zola devient apparent lorsqu’il tente de susciter un sentiment de sympathie envers les mineurs. Bien que cela ne compromette pas la richesse de son style, il s'écarte de son engagement à maintenir une distance critique par rapport à son sujet d'analyse.
L'importance de la famille est également apparente, mais la famille reste décrite dans les termes du naturalisme de Zola. Les Maheu sont dépeints scientifiquement, comme s’ils étaient observés – la chambre à coucher, la cuisine et la routine du matin sont présentées de manière factuelle. Les pensées des Maheu (et notamment de Catherine, qui est décrite en détail) ne sont pas évoquées.
Maheude occupe une position particulière dans l'intrigue de Zola en raison de sa résistance psychologique et physique. Elle s'obstine à obtenir un prêt et de la nourriture de la part de Maigrat et des Grégoire, et ne se soucie guère du fait que Maigrat fait du chantage sexuel à Catherine. Dès le début, Maheude apparaît comme attachée à sa famille et bien plus capable de subvenir à ses besoins que les femmes plus “raffinées” ou “éduquées” de la noblesse, comme Madame Hennebeau ou Madame Grégoire. Le caractère déterminé et pragmatique de Maheude est plus qu'une simple coïncidence : elle deviendra par la suite la plus véhémente partisane de la grève – sa colère et sa détermination dépassant même celles d'Étienne.
La famille bourgeoise est un lieu d'intimité et d'affect, mais aussi un endroit à partir duquel les nouveaux riches peuvent se montrer. C'est pourquoi les Grégoire prennent grand soin de leur image publique lorsqu'ils s'engagent dans des actes de charité (comme lorsqu'ils refusent de donner de l'argent à Maheude et n'offrent que de la nourriture et des vêtements). Ils considèrent qu’une telle structure devrait être libérée du contrôle de l'État, ce qui contribue à expliquer pourquoi certains membres de la bourgeoisie deviennent critiques à l'égard des institutions.
Le lecteur fait également la connaissance de Jeanlin, espiègle et violent. L'attention particulière accordée à Jeanlin montre l'intention de Zola de comprendre la relation entre l'hérédité et l'environnement. Alors que la plupart des frères et sœurs Maheu sont assez inoffensifs, Jeanlin est une manifestation particulièrement flagrante de la méchanceté. Il frappe ses amis Lydie et Bébert et les soumet ensuite à des nombreuses humiliations. Il les enjoint de faire l'école buissonnière et les incite à boire de l'alcool. Zola le compare à une variété d'animaux, tels que le chat, le loup et le chien – afin de créer un personnage d'animalité et de brutalité. Il devient l'antithèse symbolique de ce qu'Étienne souhaite accomplir, mais ironiquement, il est aussi un allié important en cas de besoin.