Thérèse Raquin

Thérèse Raquin Résumé et Analyse

Laurent rend visite à Thérèse dans son appartement presque chaque soirée, et pas seulement parce qu’il doit continuer le portrait de Camille. Il est ravi d’y retrouver le confort, la bonne nourriture toujours à disposition. Thérèse est clairement attirée par le nouvel invité ; quand Laurent travaille elle le regarde attentivement. Il se questionne : prendre ou non Thérèse comme amante. Finalement, il se décide à entamer une liaison ; les autres femmes sont trop coûteuses, et Camille n’est pas une menace.

Le portrait est enfin terminé, au grand plaisir de Camille et de Mme Raquin. Camille décide même d’acheter du champagne pour fêter cela, laissant Laurent et Thérèse seuls pour un bref moment. Cette petite occasion est tout ce dont Laurent a besoin ; il saisit Thérèse, et malgré la résistance initiale de la jeune femme, les deux font l’amour rapidement et brutalement avant le retour de Camille.

Ainsi commence la longue et exaltante liaison sous tension entre Thérèse et Laurent. Les deux amants organisent des rencontres secrètes dans la chambre de Thérèse pendant la journée ; Laurent trouve des excuses pour quitter le travail, et Thérèse laisse Mme Raquin gérer la boutique. Des changements se produisent aussi chez les amants. Intrigué mais aussi déconcerté par sa nouvelle maîtresse indomptée, Laurent commence à voir Thérèse dans sa vraie beauté. Celle-ci révèle son ressentiment profond pour Camille et Mme Raquin qui l’ont soumise à une éducation trop fermée et qui lui ont offert une vie avec si peu d’ouvertures .

Thérèse adopte aussi une attitude plus téméraire. Alors que Laurent a vraiment peur que Mme Raquin découvre leur liaison, Thérèse écarte cette possibilité et semble prendre plaisir à tromper la vieille femme. Laurent (issu d’une lignée paysanne superstitieuse) est aussi déconcerté par François, le chat attentif de Mme Raquin, alors que Thérèse le traite comme une simple présence comique et ridicule.

Pour une fois, tout va bien dans le Passage du Pont-Neuf. Laurent profite de l’atmosphère chaleureuse et familière de la boutique, il est en bons termes avec toute la maison Raquin : adoré par Mme Raquin, admiré par Camille, et chéri passionnément par Thérèse. Thérèse elle-même se sent calme, et savoure intérieurement son sentiment de supériorité par rapport à sa tante et son mari, qu’elle a réussi à tromper si habilement. Elle utilise même les longues soirées méprisées du jeudi pour arranger de nouveaux ébats amoureux avec Laurent. Cet état de suprême satisfaction dure huit mois.

Un jour, à son bureau, Laurent est averti qu’il perdra son emploi s’il continue à prendre autant de temps libre. Il se rend compte, avec angoisse, que cela l’empêcherait de voir Thérèse et conduirait à la fin de sa liaison. Thérèse est informée de ces nouvelles conditions plus tard dans la journée par Laurent lui-même. Désespérée, elle tente d’organiser d’autres rendez-vous avec lui, mais le jeune homme ne s’y rend pas à chaque fois.

Enfin, un soir Thérèse trouve une excuse pour quitter la boutique de Mme Raquin, avec l’intention de rendre visite à Laurent dans son appartement. Elle le retrouve dans le minuscule grenier dans lequel y vit. Et cette rencontre s’avère fatidique. Après s’être livrés à leur passion, Thérèse et Laurent réfléchissent à leurs projets. Laurent est follement dévoué à Thérèse et lui dit qu’il rêve de passer une nuit entière avec elle et de se réveiller à ses côtés. Mais tout le long de sa conversation, il laisse entendre que Camille pourrait faire un « voyage » ou succomber à un « accident ». Au départ de Thérèse, Laurent se rend compte qu’il est déterminé à ne pas l’abandonner et que le meurtre de Camille - idée qui venait à peine de lui venir à l’esprit - pourrait être un moyen efficace d’accéder à la vie confortable à laquelle il aspire. Même Thérèse, quand elle rentre chez elle, ressent des pulsions meurtrières envers Camille endormi.

Bien que Laurent continue de fréquenter la boutique du Passage du Pont-Neuf, il n’échange avec Thérèse que quelques infimes gestes ou manifestations de leur affection lorsqu’ils sont seuls. Quant à elle, elle a repris ses mauvaises habitudes. Pourtant, les invités du jeudi soir continuent de trouver des sources d’amusement et de divertissement, y compris les histoires de crime et de criminels racontées par le vieux Michaud.

Comme l’explique le vieux Michaud aux invités un soir, il y a de nombreux crimes qui passent inaperçus et de nombreux meurtriers qui échappent à la justice. Cette affirmation choque et fait peur à Grivet, qui veut croire que la justice peut être menée sans faille. Thérèse et Laurent ont leur propre réaction aux récits du vieux Michaud sur les crimes non résolus ; ils se regardent droit dans les yeux et semblent vibrer par anticipation.

Une des habitudes de Camille est de sortir se promener dans le centre de Paris le dimanche, souvent en compagnie de Thérèse. Pourtant, lors d’un dimanche particulièrement beau, Camille, Thérèse et Laurent décident de faire une excursion ensemble à la campagne juste à l’extérieur de la ville, où ils pourront profiter du paysage et manger. Ils arrivent aux îles autour de Saint-Ouen vers midi, et Camille s’endort dans une clairière ombragée et bordée d’arbres. Laurent ressent encore une fois des sentiments de l’affinité pour Thérèse et songe à nouveau à assassiner Camille; il lève le pied sur la tête de l’homme endormi, mais il se ravise devant un geste aussi sanglant qui laisserait des preuves irréfutables.

Camille se réveille, et se réjouit de trouver Laurent de bonne humeur. Camille et ses compagnons se dirigent alors vers un restaurant, où ils commandent à dîner, et décident de louer une barque. Le bateau que Laurent choisit est léger et pourrait facilement basculer. Cependant, Laurent entraîne à la fois Camille réticent et Thérèse de plus en plus angoissée dans cette petite embarcation. Thérèse sait ce que Laurent projette ; malgré des moments d’hésitation, elle décide de suivre son plan.

Une fois le bateau hors de vue et derrière certains îlots, Laurent met à exécution le meurtre. Il attrape Camille par le cou, commence à l’étrangler, et parvient à le jeter dans la rivière, mais pas avant que celui-ci ne le blesse en le - mordant dans au cou et lui arrachant un morceau de chair. Thérèse s’évanouit en regardant son mari lutter. Une fois Camille est à l’eau, il essaie de nager mais affaibli après quelques tentatives, il coule. Laurent saisit alors Thérèse inconsciente, renverse la barque et avertit un groupe de rameurs de l’accident présumé. Il retourne ensuite sur la rive et, après avoir laissé Thérèse dans un restaurant voisin, se rend à Paris pour annoncer à Mme Raquin l’horrible nouvelle.

Analyse

Au cours de ces chapitres, Laurent commence une liaison avec la femme de Camille et va ensuite assassiner ce dernier. Cependant, ce serait une erreur d’identifier Camille comme l’antagoniste de Laurent. Celui-ci est « en relations intimes avec Camille, mais ne ressent ni colère ni remords envers lui », et il l’assassine surtout pour supprimer un obstacle, pour s’assurer une vie de plaisirs sensuels et de stabilité financière qu’il croit que Thérèse - et son héritage - offriront.

Pour Thérèse et Camille l’histoire est différente ; ici, il y a une relation claire protagoniste-antagoniste, bien que Camille lui-même soit fatalement inconscient des sentiments hostiles de Thérèse. Pour la première fois dans le roman, Thérèse exprime en détail ses ressentiments de longue date. Elle raconte à Laurent son éducation exaspérante et stupéfiante : « Oh, quelle enfance j’ai eue ! Je ressens encore de la révulsion et de l’indignation quand je me souviens des longues journées que j’ai passées dans cette pièce avec Camille haletant ». Comme Laurent et Thérèse ne peuvent faire l’amour que dans l’appartement de Mme Raquin, Thérèse est (ironiquement) toujours coincée dans la chambre de Camille. Elle est animée par l’amour, mais elle ne peut toujours pas échapper à ses limites et à son ressentiment.

Cependant, ces chapitres comportent un départ particulier depuis le passage du Pont-Neuf. Pour la première fois, on nous donne à voir directement la misérable maison d’hébergement que Laurent loue, un grenier que Zola compare à un "taudis" et un "trou." Thérèse entre dans cet espace et trouve qu’il est "si petit que ses larges jupes pouvaient difficilement y tenir". Le problème auquel Laurent et Thérèse font face n’est peut-être pas simplement lié à des frontières sociales ou des rêves inaccessibles; qu’ils le sachent ou non, les lieux étroits et exigus qu’ils habitent tous deux peuvent les mener à un état d’agitation et de fureur.

Finalement, Laurent est poussé à assassiner Camille par ses propres frustrations, par son désir pour Thérèse : « Une passion de sang avait couvé dans ses muscles, maintenant qu’on lui retirait son amante, cette passion éclatait avec une violence aveugle ». Sur la base de telles pulsions irrationnelles, il est donc naturel de s’attendre à ce que Laurent commette un crime insensé et passionnel - mais il fait exactement le contraire. Il réfléchit soigneusement à tout son plan et prend des précautions pour éviter d’être découvert. Il envisage même brièvement de tuer Camille en se livrant à un acte de violence brutal et sanglant - levant le pied pour écraser la tête de Camille endormi - mais il a suffisamment de bon sens pour voir à quel point ce meurtre serait facilement résolu.

Le meurtre que commet Laurent est d’une sauvagerie sans faille : il ressemble à un accident et ne livrant aucun indice l’incriminant. Laurent laisse même l’impression qu’il aurait tenté de sauver Camille de la noyade avec ardeur et héroïsme. Bien que Zola ne cesse de souligner les différences de tempérament entre Thérèse et Laurent, les deux protagonistes ont trouvé un point commun majeur à la fin de ce chapitre. Ils sont tous deux devenus compétents dans l’art de la tromperie.