Rhinocéros

Rhinocéros Thèmes

L'individualité

L’individualité est peut-être le thème le plus important de la pièce puisqu’il est à l’origine de la métaphore du rhinocéros. La principale différence entre Bérenger et les autres personnages est que le premier refuse de rejoindre les seconds : il n’a pas peur d’être seul et de continuer à se battre pour ce qu’il croit être juste. Son apparence négligée laisse penser, dès le début de la pièce, qu’il n’a pas peur du regard des autres. Lorsque Jean, Dudard et Daisy rejoignent les rhinocéros, le public peut percevoir le moment où tout bascule, car ils perdent tout sens de la morale et de l’individualité. Ionesco suggère que cette individualité est inhérente à la nature humaine.

Le nazisme

Rhinocéros est une immense métaphore de la prise de contrôle de l’Allemagne par les nazis. La pièce met en scène des personnes ordinaires qui se transforment du jour au lendemain en quelque chose de monstrueux. Cela fait penser à l’Holocauste et à la façon dont le peuple allemand a permis à un gouvernement de faire quelque chose d’aussi terrible. Grâce à sa métaphore du rhinocéros, Ionesco nous invite à réfléchir à la façon dont le nazisme est arrivé au pouvoir et y est resté.

La valeur de chaque individu

Dès la première scène, Ionesco s’interroge sur ce qui détermine la valeur des individus. Jean souhaite convaincre Bérenger que la valeur personnelle des hommes repose sur leur apparence, alors que Bérenger découvre par la suite que cela dépend de quelque chose de plus grand, de plus courageux. La dernière phrase du personnage principal, " Je ne capitule pas ! ”, permet à Bérenger de s’affirmer, et de convaincre les spectateurs que ce qui compte le plus est ce qui est à l’intérieur, pas à l’extérieur. L’estime de soi découle en réalité de ce qui fait de nous des êtres humains, c’est-à-dire notre capacité à respecter notre intégrité même en temps de crise.

La logique erronée

Tout au long de la pièce, les personnages débattent de choses et d’autres, mais leurs arguments sont fondés sur une fausse logique. Dès la première scène, le Logicien soutient que tous les objets à quatre pattes sont des chats. Peu après, Dudard affirme que les périodiques ne sont que des instruments de propagande. La situation est d’autant plus étonnante que les autres protagonistes se laissent facilement convaincre par ces raisonnements. Ceux qui recourent à une fausse logique ont tendance à n’accepter que les preuves qui étayent leurs propres affirmations. Bérenger reste le seul personnage capable de garder les idées claires et de distinguer la vérité du mensonge, et c’est ce qui lui permettra de rester humain.

L'autorité

Normalement, le rôle de l’autorité est de maintenir l’ordre dans la société, mais ce rôle peut s’avérer problématique lorsque cet ordre est injuste ou inhumain. Le Logicien, en déployant des raisonnements irrationnels, s’auto-sabote et invalide sa propre autorité. M. Papillon, le respecté patron des ouvriers, fait volontairement le choix de se transformer en rhinocéros. Tout cela rend la situation encore plus complexe car si les figures d’autorité capitulent, alors les personnages ordinaires sont encore moins enclins à penser par eux-mêmes. Trop souvent, les individus se trouvent dans l'incapacité de distinguer leurs pensées personnelles de celles émanant des figures d'autorité plus puissantes.

L'amour

Deux couples sont mis en scène dans la pièce. D’abord, Bérenger semble fou amoureux de Daisy, qui finit par prétendre être également amoureuse de lui. En réalité, leurs différences les rendent incompatibles puisque Daisy souhaite se transformer en rhinocéros. Ensuite, M. et Mme Bœuf, eux, sont beaucoup plus fusionnels. Cela se ressent lorsque Mme Bœuf décide de se transformer en rhinocéros pour ne pas avoir à vivre sans son mari. On peut alors se demander si cet amour persistera une fois que les deux membres du couple seront des rhinocéros.

Bérenger et Jean

Bérenger et Jean sont on ne peut plus différents, puisque le second est le faire-valoir du premier. Leur apparence extérieure est distincte, mais leur chambre se ressemble, et l’on confond leur voix. Qu’est-ce qui fait de chacun d’entre eux quelqu’un d’unique ? Bérenger résiste à l’envie de devenir un rhinocéros, car il a une individualité et une personnalité que Jean n’a pas. Pourquoi tient-il autant à être si différent des autres ? Cette question est posée par cette pièce, mais aussi par tout le théâtre de l’absurde en général.

L'absurdité

La pièce est un parfait exemple du théâtre de l’absurde. La métaphore originelle, la transformation des gens en rhinocéros, est tout à fait absurde. Elle est même une métaphore au sein de la métaphore plus globale de la pièce. L’absurdité, l’irrationalité inhérente à la nature humaine, permet à l’œuvre de critiquer les régimes autoritaires qui prétendent être bien plus rationnels qu’ils ne le sont réellement. La pièce utilise aussi l’humour et l’effet de surprise, et l’absurdité sert alors à repenser les traditions du théâtre classique.

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