Le destin comparé à un fleuve (comparaison)
“ Je compare la fortune à l’un de ces fleuves dévastateurs qui, quand ils se mettent en colère, inondent les plaines, détruisent les arbres et les édifices, enlèvent la terre d’un endroit et la poussent vers un autre. ”
Machiavel appelle “ fortune ” le hasard par lequel les choses se produisent. Ce hasard est qualifié de destin par ceux qui considèrent que toute chose a lieu pour une raison. Machiavel compare donc le hasard à un fleuve destructeur en colère, insinuant que celui-ci blesse nécessairement l’individu. Considérer que le Hasard peut se mettre en colère semble antinomique avec la perception du Hasard (ou du Destin) comme désignant le cours neutre et inaliénable de la vie. Il est donc plus plausible que Machiavel désigne par cette " colère ” l’interprétation que l’individu fait de ce qui lui arrive et qui n’est pas de son propre fait.
L’État comme un arbre (métaphore)
Dans une autre référence à la nature, Machiavel assimile les États à des arbres :
“ En outre, les Etats qui croissent tout à coup, comme toutes les autres choses de la nature qui naissent et poussent rapidement, ne peuvent avoir des racines et des ramifications telles que le premier orage ne les détruise ; à moins que de tels hommes, comme on l'a dit, qui sont devenus si soudainement des princes, n'aient assez de valeur pour que, ce que la fortune leur a mis entre les mains, ils sachent aussitôt se préparer à le conserver, et que, ces fondements que les autres ont édifiés avant de devenir princes, ils les édifient ensuite. ”
Cette métaphore présente les capacités de transformation de l’État d’un point de vue particulier : l’État se transforme sans changer de nature ; ses éléments constitutifs sont les mêmes, mais ses qualités et ses capacités évoluent. Sa croissance – comme celle de l’arbre, mais ici au sens de son expansion territoriale et de son administration – doit être maîtrisée sous peine de conduire à sa destruction. L’État doit donc être prudemment administré pour conserver une existence pérenne.
La cité comme un corps soumis aux humeurs (métaphore)
Machiavel fait usage d’autres comparaisons ou métaphores qui se rapportent à la nature. Parlant de la cité, il déclare :
“ Car en chaque cité l'on trouve ces deux humeurs différentes ; cela naît de ce que le peuple désire n'être ni commandé ni opprimé par les grands, et que les grands désirent commander et opprimer le peuple. De ces deux appétits différents naît dans les cités un de ces trois effets : monarchie, liberté ou licence. ”
L’auteur compare ici la cité, forme de micro-État à l’époque de Machiavel, à un corps humain ayant des humeurs. La cité devient ainsi un organisme vivant, qui d’une part est mortel, et d’autre part peut être en bonne ou en mauvaise santé. Le terme " d’humeur ” au Moyen-Âge et à la Renaissance désigne certains éléments du corps – le sang, la bile, le phlegme et la bile noire – mais aussi un état affectif et émotionnel particulier. En prêtant des humeurs à la cité, l’auteur insiste sur sa fragilité et sur la nécessité de prendre en charge ses maux – de la soigner, comme on le ferait pour un corps humain – pour éviter sa ruine.
L’humain et la bête (métaphore)
À plusieurs reprises, Machiavel suggère qu’un souverain, en tant que dirigeant, doit " user de la bête ”.
Par cette métaphore, il implique que l’administration d’un État requiert des qualités humaines mais aussi des traits de caractère usuellement associés à certains animaux, qu’il cite par la suite. Le souverain doit ainsi se comporter parfois comme un lion – animal emblématique de la force – et parfois comme un renard – c’est-à-dire faire preuve d’une grande ruse. Par la ruse, Machiavel désigne la nécessité, pour le souverain, de ne pas respecter ses promesses tout en gardant une apparence de fidélité et de loyauté.
Le hasard personnifié en une femme violentée (métaphore)
Dans Le Prince, Machiavel personnifie la fortune – le hasard, le destin – en une femme, affirmant que “ la fortune est femme ” et “ qu’il est nécessaire de la battre si on veut la dominer. ”
Machiavel apparaît généralement comme un philosophe misogyne, qui ne s’intéresse pas aux figures féminines dans ses œuvres et qui emploie une rhétorique qui reprend les codes patriarcaux de la Renaissance, encore présents de nos jours. Toutefois, certains analystes notent que Machiavel s’écarte d’une vision biologisante de la femme – chose rare à son époque – et ne tient pas les codes considérés comme “ féminins ” et la sexualité hors du champ de la politique.